Je publie avec l'accord de mon fils Vivien, les lettres journalières que je lui ai adressées. Cela est probablement une forme d’exhibitionnisme, mais aussi un partage thérapeutique.

samedi 30 avril 2016

Huitième lettre



Mardi 13 janvier 2015

Quand tu te réveilleras, te souviendras-tu que le mardi se situe entre le lundi et le mercredi. Si mes souvenirs ne sont pas trop mités, ton instit de CE1 s’inquiétait car tu ne connaissais pas les jours de la semaine. J’avais dû la rassurer en lui parlant d’intemporalité. Elle m’avait regardé tel un bovin à qui on expliquerait la composition des plats cuisinés à base de viande bœuf qui transiteraient par Spanghero.
Nous n’en sommes pas encore là. Pour l’instant, nous souhaitons que tu reviennes parmi nous avec un cerveau en état de fonctionner. Tu peux me croire, notre exigence est presque irrationnelle, cependant nous n’y attachons comme je m’attache à mes coucougnettes. Ceci n’engage que moi. Et puis, je serais prêt à donner plus pour que tu reviennes, et il n’y a pas que moi. D’ailleurs lorsque tu reviendras (je croise les doigts de pieds, c’est plus difficile), tu t’apercevras que tes très proches sont amputés d’une partie de leur corps. Nous t’avons tous offert une partie de nous-même afin de te reconstituer. Le jeu sera de deviner à qui appartenaient les différents morceaux du puzzle.
De toute façon, nous sommes déjà tous amputés. Nous sommes amputés de toi.
Nous avons peur, tu flirtes avec les limites de l’au-delà. Sincèrement nous n’apprécions pas. Sur une échelle de cent, tu es pratiquement à 99.9.  De temps à autre, tu descends à 99 puis tu remontes. S’il te plait, descends de l’échelle sinon ta mère viendra te chercher, et tu connais son amour fusionnel et possessif. Pour te ramener elle serait capable de se marier avec son petit chéri d’amour des iles Caïmans. Si cela n’est pas suffisant, je couperai les pieds de l’échelle. Et tant pis si tu te casses deux jambes.
Nous avons reçu une adorable lettre des élèves de ta classe, ils te souhaitent tous un prompt rétablissement et même beaucoup plus :
 Ils sont tristes et choqués. Tu leur manques. Pour Loan, tu n’es pas seulement un camarade de classe mais aussi un ami. Guillaume est aussi près de toi par la pensée, ta sœur l’appelle régulièrement. Hugo de même. Sans parler de toute notre famille, des amis proches et lointains. Tu es entouré d’une farandole de pensées et d’amour*. Tu as même reçu un texto où certains de tes camarades te déposaient un bisou sur les fesses.
Maintenant je t’abandonne. Je vais chez Sylvianne. Je lui réserve une surprise. J’ai subi une ablation des parties génitales, je vais pouvoir enfin la séduire.

Ps : les parties, c’est toi maintenant qui les as. Ok, ce n’est pas un cadeau. Mais que veux-tu, c’était ça ou mon cerveau.
Bisous.

* le texte en italique est écrit par la maman de Vivien.

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