Mardi 13
janvier 2015
Quand tu te
réveilleras, te souviendras-tu que le mardi se situe entre le lundi et le
mercredi. Si mes souvenirs ne sont pas trop mités, ton instit de CE1
s’inquiétait car tu ne connaissais pas les jours de la semaine. J’avais dû la
rassurer en lui parlant d’intemporalité. Elle m’avait regardé tel un bovin à
qui on expliquerait la composition des plats cuisinés à base de viande bœuf qui
transiteraient par Spanghero.
Nous n’en
sommes pas encore là. Pour l’instant, nous souhaitons que tu reviennes parmi
nous avec un cerveau en état de fonctionner. Tu peux me croire, notre exigence
est presque irrationnelle, cependant nous n’y attachons comme je m’attache à
mes coucougnettes. Ceci n’engage que moi. Et puis, je serais prêt à donner plus
pour que tu reviennes, et il n’y a pas que moi. D’ailleurs lorsque tu
reviendras (je croise les doigts de pieds, c’est plus difficile), tu
t’apercevras que tes très proches sont amputés d’une partie de leur corps. Nous
t’avons tous offert une partie de nous-même afin de te reconstituer. Le jeu
sera de deviner à qui appartenaient les différents morceaux du puzzle.
De toute
façon, nous sommes déjà tous amputés. Nous sommes amputés de toi.
Nous avons
peur, tu flirtes avec les limites de l’au-delà. Sincèrement nous n’apprécions
pas. Sur une échelle de cent, tu es pratiquement à 99.9. De temps à autre, tu descends à 99 puis tu
remontes. S’il te plait, descends de l’échelle sinon ta mère viendra te
chercher, et tu connais son amour fusionnel et possessif. Pour te ramener elle
serait capable de se marier avec son petit chéri d’amour des iles Caïmans. Si
cela n’est pas suffisant, je couperai les pieds de l’échelle. Et tant pis si tu
te casses deux jambes.
Nous avons
reçu une adorable lettre des élèves de ta classe, ils te souhaitent tous un
prompt rétablissement et même beaucoup
plus :
Ils
sont tristes et choqués. Tu leur manques. Pour Loan, tu n’es pas seulement un
camarade de classe mais aussi un ami. Guillaume est aussi près de toi par la
pensée, ta sœur l’appelle régulièrement. Hugo de même. Sans parler de toute
notre famille, des amis proches et lointains. Tu es entouré d’une farandole de
pensées et d’amour*. Tu as même reçu un texto où certains de tes camarades
te déposaient un bisou sur les fesses.
Maintenant je
t’abandonne. Je vais chez Sylvianne. Je lui réserve une surprise. J’ai subi une
ablation des parties génitales, je vais pouvoir enfin la séduire.
Ps : les
parties, c’est toi maintenant qui les as. Ok, ce n’est pas un cadeau. Mais que
veux-tu, c’était ça ou mon cerveau.
Bisous.
* le texte en
italique est écrit par la maman de Vivien.
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