Mon fils, cela fait presque une semaine
qu’une nouvelle nous a heurtés de plein fouet. Elle est moins traumatisante que
l’arbre que tu as embrassé, mais elle nous laisse sans force et avec une
conscience exacerbée de ton état et de notre douleur.
Tu n’es pas conscient
de la gravité de tes blessures, actuellement tu ne sais pas que tu existes. La
notion de vie n’a plus aucune signification, la notion de mort
aussi, pourtant elle plane tous les jours au-dessus de toi et attend la moindre
faille pour t’arracher de ses noires serres et t’emmener je ne sais où.
Pourtant toi seul possède le pouvoir de revenir parmi nous et de niquer la
mort.
Mais peut-être aussi
que maintenant tu connais nos deux mondes, celui bien présent et celui dont
nous, simples mortels, ignorons même les contours, ce qui ne nous empêche pas
de nous taper sur la gueule à cause de la différence d’interprétation que nous
pouvons nous faire de ces mondes. Tu es peut-être déjà attiré par ce monde
inconnu et tu n’oses pas franchir la frontière de peur de nous abandonner. Tu
es libre, et toi seul peut décider de ton avenir. D’accord, nous t’avons un peu
débranché afin que tu ne te précipites pas la tête la première vers un avenir
qui nous dépasse. Que veux-tu, nous ne te lâcherons pas la grappe aussi
facilement. Ne serait-ce que Ninon qui est prête à te ramener avec toute la
hargne que tu lui connais.
D’ailleurs toi qui as
toujours voulu avoir des supers pouvoirs, maintenant tu en as. Tu doutes !
Pour empêcher ta sœur de travailler, mettre ton père en arrêt de travail, et
bloquer la trousse de maquillage de ta mère, n’est-ce pas des pouvoirs
surnaturels. Si t’insistes, je pense que ta mère peut profiter encore de ta
force de persuasion.
Sinon ici la vie n’est
pas rose. A moins qu’elle le soit, alors nous sommes embrochés sur ses épines.
Tu nous manques.
Je ne sais pas, si un
jour tu liras ou même entendra, sous la dictée, ces quelques pages. Mais si cela arrive, cela voudra dire
que notre souffrance n’a pas été vaine.
Tous les jours, nous
attendons quinze heures afin de téléphoner aux médecins pour qu’ils nous
livrent ton bulletin de santé. Et oui comme tu l’as deviné nous ne sommes pas à
tes côtés. Quand tu fais les choses, tu
ne les fais pas à moitié. Tu es hospitalisé à Marseille. De plus tu es dans le
coma, doublé d’un coma artificiel. Alors lorsque nous sommes là, tu ne
t’aperçois pas de notre existence. Donc pour l’instant nous avons fait le choix
de rester près des personnes qui daignent s’apercevoir de notre présence. Nous
ne t’abandonnons pas. Nous gardons nos forces pour plus tard. Tu risques
d’avoir besoin de nous pour d’aider à te réadapter à la vie terrestre. (De
toute façon, notre présence aurait pu t’être fatale)
Je viens d’entendre ta
mère tousser. Il faut qu’elle arrête de fumer. Sinon à ce rythme-là, elle sera
partie avant que tu sois revenu entièrement. Tu ne pourras que t’appuyer sur
moi, et je ne suis pas sûr d’être assez solide, même avec le soutien de Jean et
d’Anneso. S’il te plait, use de tes supers pouvoirs pour contraindre ta mère à
arrêter de fumer.
Hier tu as passé un
scanner. Ton petit frère t’a imité. Je crois même qu’il a imité ton coma. Il a
dit qu’il avait la tête qui tournait et s’est endormi. Urgence et tout le
tintouin ont été la suite « logique » de cet incident. Ne t’inquiète
pas, il va bien. Par contre il fait aussi dans la simplicité. La nounou n’avait
pas de voiture, Anneso était à Amiens, moi à Fécamp. T’imagine le bordel que
cela a été. Evidemment Sylvianne et Caro sont intervenues telles Zorro avec son
grand chapeau.
Aujourd’hui, mardi
06/01/2015, ton PIC est presque stabilisé avec en prime un peu moins
d’anesthésiant. Et pour nous faire chier, tu as un peu de fièvre. Nous n’avons maintenant
que la patience pour nous servir d’espoir. Demain à quinze heures, nous aurons
ton bulletin de santé communiqué par téléphone.
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